Une Bien étrange attraction est le premier roman de Tom Robbins, publié pour la première fois en 1971. Ecoulé à 6 000 exemplaires lors de sa sortie, il affiche aujourd’hui 2 millions de ventes au compteur. Les éditions Gallmeister qui viennent de rééditer ce huitième roman de l’Américain entendent faire découvrir au public français cet auteur si réputé outre Atlantique…

Une Bien étrange attraction. « Etrange », le mot est on ne peut mieux choisi : tout au long de ces 400 pages, on ne cesse d’hésiter entre adoration et rejet, et pour ma part, même après l’avoir refermé, je ne sais encore quelle position adopter vis-à-vis de ce livre pour le moins atypique…

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Nous sommes au coeur des années 60. Amanda et John Paul Ziller, jeunes mariés, incarnent à merveille les valeurs de l’époque : libération sexuelle, goût pour la philosophie, pour la nature… Ensemble, ils décident de monter ce qu’ils appellent une « attraction de bord de route », qui se résume en fait à un stand de hot dogs et un zoo pour le moins original, habritant couleuvres et autres puces savantes…

Tout irait pour le mieux dans le meilleur des mondes si, un jour de (mal)chance, leur ami Plucky Purcell n’infiltrait pas (par hasard – si, si !) une armée secrète du Vatican. En effet, son imposture (qu’il considère au départ ni plus ni moins comme un jeu) prend des allures inquiétantes lorsqu’elle l’amène à découvrir le corps du Christ momifié ; corps qu’il décide alors de voler et de cacher dans le zoo…

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L’histoire est des plus saugrenues et des plus osées, vous en conviendrez !

Mais Tom Robbins manie si merveilleusement la plume qu’à l’image son héros magicien, il parvient à nous aveugler et à nous faire oublier cet aspect tant loufoque de son intrigue pour nous y faire adhérer à 100%. Cette force de persuasion, caractéristique de son écriture, lui vaut d’ailleurs d’être aujourd’hui considéré par certains critiques comme « l’écrivain le plus dangereux du monde » : sa plume est telle qu’elle repousse les frontières de l’imagination et parviendrait -presque- à nous faire croire que les poules ont des dents ! Et c’est peu dire…

Il n’hésite d’ailleurs pas à l’utiliser dans ce sens : chaque épisode (même mineur) d’Une Bien étrange attraction est prétexte aux digressions philosophiques (au point de nous amener d’ailleurs à les considérer comme l’essence même du livre), où l’auteur nous invite à réfléchir sur des questions fondamentales, telles que l’amour, le sens de la vie, ou encore la religion.

Cependant, aussi passionnantes soient ces digressions, aussi belle soit l’écriture de Tom Robbins, mon engouement pour ce roman est loin d’être total. En effet, malgré les qualités indéniables de sa plume, l’auteur a la fâcheuse tendance de systématiquement « tourner autour du pot » et, de fait, tend à perdre le lecteur au milieu de descriptions infinies…  Très certainement qu’il était de sa volonté de casser ainsi et de façon aussi régulière le rythme, mais avait-il anticipé l’ennui potentiel qui risquait alors d’envahir le lecteur  ?

Pour ma part, ces longueurs ont considérablement gâché mon plaisir, et « fascination » est sans doute le mot qui définit finalement le mieux mon sentiment vis-à-vis de ce livre : un mélange de répulsion et (d’étrange) attirance…